Se prémunir de désillusions avec le carbone

La production de biomasse, favorable au stockage de carbone, peut être contradictoire avec l’autre levier d’acquisition de crédits carbone qu’est la non-émissions de GES. Photo : Pixel6TM

Émettre moins de carbone et en stocker davantage semble, après les premières simulations réalisées dans le cadre du consortium CarbonThink, moins évident qu’il n’y paraît. Mieux vaut simuler avant de se lancer sur le marché.

"L’agriculture de conservation des sols permet en règle générale d’être plus performant vis-à-vis de la problématique carbone que l’agriculture biologique, ose Édouard Lanckriet, d’Agrosolutions, à l’occasion d’une conférence organisée par Terrasolis lors de la Foire de Châlons-en-Champagne. Cependant, les différences ne sont pas toujours significatives entre les deux modes de productions. Ce qui crée de véritables différences, c’est le contexte pédoclimatique, technique et stratégique des exploitations."

Ces différences sont d’ailleurs flagrantes dans les résultats des dix fermes passées au crible de la méthodologie d’évaluation du Label bas-carbone dédiée aux grandes cultures dans le cadre du projet CarbonThink. Même si l’expert d’Agrosolutions estime que "les chiffres émanant de ces premières simulations sont des fourchettes basses, car les perspectives de gain mesurées reposent sur la mise en place réaliste, voire prudente, de nouvelles pratiques, sans chercher à cracher du carbone pour les dix agriculteurs beta-testeurs", il en ressort que la majorité des agriculteurs ne sont capables de générer qu’entre 0 et 0,5 crédit carbone/ha/an sur leur ferme avec les leviers mis en place. Rares sont ceux qui ont la capacité de générer plus d'un crédit carbone/ha/an. À l’opposé, certains agriculteurs "qui pensaient bien faire", ont tendance à déstocker du carbone avec des pratiques nouvellement mises en œuvre et donc ne génèrent aucun crédit carbone.

Des courbes de réponse inverses pour le stockage et la non-émission de CO2

"Les deux leviers permettant de générer des crédits carbone – la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) et le stockage de carbone dans les sols – affichent souvent des courbes d’évolution inverse, détaille Édouard Lanckriet. La réduction des émissions de GES se traduit principalement par une diminution du recours à l’azote exogène – 30 unités d’azote minéral en moins permettent d’économiser par exemple 350 kg de CO2 équivalent. Cette diminution engendre souvent une baisse de la production de biomasse qui se traduit donc par une diminution du stockage de carbone dans le sol. L’équation n’est donc pas simple." Il est alors plus facile de comprendre que l’agriculture biologique est handicapée par rapport à l’agriculture de conservation des sols.

Chaque levier à un coût à considérer

Chaque levier a un coût qui s’avère très disparate d’une exploitation à l’autre, car dépendant des objectifs que chaque agriculteur se fixe. Pour les dix fermes passées au crible, le coût de revient moyen d’un crédit carbone est compris entre 50 et 200 euros (le temps consacré à la mise en place des leviers est considéré à hauteur de 20 euros/heure). Peu de fermes parviennent à descendre sous les 50 euros/crédit. Pour illustrer ces chiffres, Édouard Lanckriet évoque le levier des couverts végétaux d’interculture, principal levier en grandes cultures pour stocker du carbone (1 tMS/ha supplémentaire d’interculture permet d’économiser par exemple 680 kg de CO2 équivalent). "Le coût moyen des couverts végétaux dans le panel est de l’ordre de 50 euros/ha. Or, en émettant l’hypothèse d’une production de biomasse de 1,5 tMS/ha/an et de 3 tMS/ha/an, la surface concernée peut générer respectivement 0,9 à 1 crédit carbone/ha/an et 2 à 2,5 crédits/ha/an. Au prix actuel du carbone sur le marché, la rentabilité est loin d’être assurée. C’est pourquoi, il est essentiel de prendre le temps de réaliser des simulations avant de se lancer dans un programme de rémunération du carbone."

 

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