La betterave se met au semis direct

La quantité importante de résidus en surface empêche d’atteindre toutes les adventices quand elles sont au stade point vert. Pour cette raison, le Gaec Bollaert retarde le premier herbicide. Photos : Mathieu Lecourtier/Média&Agriculture

Passer au semis direct strict – ou presque – en 2016... Le Gaec Bollaert a entrepris de le faire sur toutes les cultures de sa sole, y compris les betteraves pour partie depuis 2017. Deux premières années de recul plutôt satisfaisantes.


Dès son coup d’essai de semis direct en betteraves dans un couvert vivant d’orge de printemps en 2017, le Gaec Bollaert en a tiré les bénéfices, avec 29 t/ha de rendement supplémentaires sur les 3 ha plantés ainsi par rapport aux itinéraires en TCS et en labour. « Ce premier résultat ne s’explique pas uniquement par le non-travail du sol, indique Eddy Bollaert, l’aîné des deux frères associés au sein du Gaec Bollaert. En TCS et en labour, le sol a été travaillé trop tôt, dans de mauvaises conditions. Ce qui a engendré des levées hétérogènes, un développement hétérogène et donc une érosion du potentiel. Alors que les betteraves semées en direct l’ont été dans de meilleures conditions, avec une réserve de fraîcheur dans le sol qui a permis d’exprimer le potentiel de la parcelle. » En 2018, les résultats étaient plus équilibrés, avec un rendement inférieur de 4 t/ha pour les 7 ha en semis direct par rapport au TCS et au labour. Pour autant, Eddy Bollaert juge cette différence très acceptable et non significative compte tenu des types de terre dans lesquels se situaient les différents itinéraires comparés. C’est d’ailleurs pour cette raison que le Gaec a réitéré le semis direct de betteraves sur 6 ha en 2019.

En moyenne, le SD en betteraves permet une économie de 50 à 70 euros/ha sur le poste herbicide.

« L’une de nos principales craintes quant au semis direct des betteraves était le développement des pivots de la culture, souligne Eddy Bollaert. Nous craignions les betteraves fourchues ! Or, il est apparu lors de nos observations que les plus beaux pivots se trouvaient là où les betteraves sont semées en direct… On l’explique par le fait que les betteraves, dans leur recherche de fraîcheur et d’humidité, vont suivre les galeries de vers de terre verticales. Elles n’ont alors plus qu’à "grossir" dedans. Alors qu’en système avec travail du sol, il y a toujours des mottes qui engendrent du fourchage. » La philosophie des deux frères Bollaert est clairement de ne pas perturber le sol et d’éviter à tout prix le recours à la bineuse afin de préserver la faune du sol. Ce qu’ils font pour toutes les autres cultures de l’exploitation, ils parviennent enfin à le faire sur une partie de la sole de betteraves.

Un couvert d’orge de printemps semé à l’automne

Après la récolte du précédent qui est souvent un blé ou une orge de printemps, un couvert végétal (mélange de féverole, de vesce, de lentille, de pois fourrager, de lin, de tournesol, de sarrasin, de phacélie, de moutarde anti-nématode et de radis fourrager anti-nématode aussi) composé à 70 % de légumineuses est implanté au plus tard dans les huit jours qui suivent la récolte. Pour mettre toutes les chances de leur côté, les frères Bollaert ont fait le choix de faucher haut lors de la récolte du précédent et ce qui est quand même « avalé » par la moissonneuse-batteuse est broyé et éparpillé. Dans ce même dessein, ils fertilisent systématiquement le couvert en localisé au semis avec 50 kg/ha d’un engrais composé à 12 % d’azote, 25 % de phosphore et 27 % de soufre. « Cela ne représente pas de grosses doses, exprime Eddy Bollaert, mais suffit pour "amorcer la pompe" du couvert, tout en évitant de rendre le système racinaire fainéant, et ainsi lui assurer le meilleur développement possible. » 3,5 t/ha de vinasses viennent compléter la fertilisation du couvert avant ou après son semis.

Le semis est réalisé dans l’orge de printemps vivante semée à l’automne précédent qui sera détruite avec le premier désherbage des betteraves.

Le couvert végétal multi-espèces se développe ensuite jusqu’à la fin octobre ou début novembre. Période à laquelle est semé un couvert relais d’orge de printemps à hauteur de 300 graines/m2 – une densité de semis « normale ». Le semis, réalisé avec un semoir de semis direct à disques, a aussi l’avantage de blesser le couvert végétal en place qui est ensuite détruit par le gel durant l’hiver. Le semis de betteraves est ensuite réalisé au printemps dans le couvert végétal vivant dès que les conditions le permettent. En 2019, le semis a été réalisé le 27 février à raison de 112 000 graines/ha. De l’antilimaces est systématiquement incorporé dans la ligne de semis.

Un gain substantiel sur le désherbage

Dès le semis des betteraves en direct, l’itinéraire technique de la culture est identique à une conduite plus conventionnelle, à un détail près : le couvert vivant d’orge de printemps offre la possibilité d’alléger le programme de désherbage. Cela étant dit, le premier désherbage antidicotylédones (BTGV) ressemble à une conduite classique. En 2018, les frères Bollaert avaient appliqué – le 9 avril pour un semis du 24 mars – 0,6 l/ha de Daneline ; 0,15 l/ha de Candi 500 ; 0,3 l/ha de Tornado SC ; 0,1 l/ha de Venzar ; le tout adjuvanté de 1 l/ha de Mix-in. « Les débris végétaux cachant beaucoup les adventices en présence, il est très difficile d’intervenir au stade point vert de ces dernières, estime Eddy Bollaert. À ce titre, nous réalisons le premier désherbage antidicotylédones quand les betteraves ont atteint le stade cotylédons. Le second est effectué une dizaine de jours plus tard et adapté à la flore présente, les betteraves sont alors entre le stade 2 et 4 feuilles. Ce qui impose des doses légèrement supérieures pour éliminer des adventices souvent un peu plus développées. Néanmoins en semis direct, il n’y a pas de levée récurrente de petites adventices. » Ainsi en 2018, le second désherbage antidicotylédones (BTGV) est intervenu le 27 avril avec 1,5 l/ha de Betapham ; 0,3 l/ha de Candi 500 ; 1 l/ha de Menhir FL adjuvantés de 1 l/ha de Mix-in. Une stratégie de désherbage allégée toutefois par rapport aux conduites les plus classiques. Ce programme BTGV a simplement été complété avec 0,75 l/ha de Centurion adjuvanté de 1 l/ha de Mix-in contre les graminées le 17 avril 2018.

Eddy Bollaert estime réduire son coût de mécanisation de 100 à 150 euros/ha par rapport à un itinéraire en TCS ou en labour.

Eddy Bollaert précise : « Si la parcelle ne compte que des pieds d’orge de printemps au moment du semis des betteraves, nous laissons le couvert vivant jusqu’au premier désherbage BTGV. Si, en revanche, nous observons des graminées adventices dans le couvert végétal d’orge de printemps, nous appliquons du glyphosate avant le semis pour détruire l’orge et les adventices en question. » Cela étant dit, rien n’est encore acquis. Les deux frères cherchent à améliorer la technique avec, par exemple, l’implantation de couverts en bande telle que la technique du strip-till végétal avec différenciation des espèces sur le rang et dans l’interrang.

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