« Le Royaume-Uni deviendra un pays tiers »

Éric Andrieu est député européen depuis 2012. Il est réélu en 2014 pour un mandat de 5 ans. Il siège au sein du groupe de l'Alliance progressiste des socialistes et démocrates (S&D). Il est vice-président de la Commission de l'agriculture et du développement rural. 

Éric Andrieu, eurodéputé PS : « Le Royaume-Uni deviendra un pays tiers ». Photo : DR

Quel bilan tirez-vous à mi-chemin de la législature 2014-2019 ?

Éric Andrieu Sur le plan législatif j’ai été très impliqué dans la révision sur l’agriculture biologique qui constitue un dossier politique important très technique et complexe. Nous avons eu 14 réunions de trilogue avec la Commission européenne et le Conseil qui représente les 28 États membres. Ce dossier n’a pas pu être bouclé sous la présidence slovaque. Il nous faut continuer avec la présidence maltaise qui a commencé le 1er janvier, l’objectif étant bien d’améliorer la législation existante pour à la fois accompagner la croissance du secteur tout en apportant le maximum de garanties aux consommateurs.

La Commission de l’agriculture, à laquelle j’appartiens, a par ailleurs produit des contributions dans la perspective de la prochaine Politique agricole commune (PAC) pour l’après 2020 : rapports sur l’innovation, sur l’après-quotas laitiers, sur la volatilité des prix, sur les spécificités de l’agriculture face à la politique de concurrence.

Le Parlement européen a adopté le 27 octobre dernier mon rapport d’initiative sur le thème «Comment l’agriculture peut-elle créer des emplois en zones rurales». Ce rapport construit avec des acteurs de terrain propose un changement de paradigme et un nouveau modèle agricole. La PAC actuelle ne satisfait ni les agriculteurs, ni les organisations environnementales, ni les citoyens qui sont également contribuables. Elle peut et doit être réorientée. Toutes les réformes de la PAC engagées depuis les années 1990 ont laissé le libre cours au seul marché, dévastateur pour les agriculteurs, l’emploi, l’économie des territoires et dangereux pour notre sécurité alimentaire. Mon rapport recommande une «reterritorialisation» de l’agriculture organisée autour de circuits courts et d’une économie circulaire. Les États membres doivent mettre en œuvre une stratégie globale de renouvellement des générations, en soutenant davantage les jeunes agriculteurs.

Le Brexit a-t-il une incidence sur le budget et le calendrier des réformes ?

É. A. Pour l’instant pas. Le Royaume-Uni n’est pas encore sorti de l’UE. S’il devait confirmer sa sortie, il y aurait des implications budgétaires. Les plus grosses difficultés se poseront avec la politique commerciale de l’UE. Le Brexit fera sortir le Royaume-Uni de l’union douanière et rétablira des frontières entre l’UE et le Royaume-Uni. Il nous faudra réexaminer une centaine d’accords commerciaux de l’UE dans lesquels le Royaume-Uni est impliqué. Le Royaume-Uni deviendra un pays tiers avec les conséquences que cela peut impliquer sur l’accès à son marché. Cela peut avoir des implications pour notre agriculture.

Sur les traités bilatéraux : le traité transatlantique est à l’arrêt depuis notamment l’arrivée de D.Trump au pouvoir. Est-ce une bonne chose selon vous ? Le Ceta est en cours et devrait être appliqué à titre provisoire en 2017. Peut-on attendre des modifications/impacts sur le commerce de denrées agricoles?

 

É. A. Oui, car après plus de trois années d’âpres discussions, le TTIP, tel qu’il était négocié, ne répondait à l’évidence pas aux intérêts européens et français. De l’aveu même de certains fonctionnaires européens, force est de constater que les négociations ont été jusqu’ici déséquilibrées et il n’y avait pas de réciprocité dans les offres échangées entre les deux grandes puissances commerciales. Cela est en particulier vrai pour l’agriculture européenne qui fait l’objet d’une vaste offensive de la part des États-Unis. Ces derniers souhaitent à tout prix ouvrir les portes du marché européen à leur agro-business, ce qui constitue une menace directe pour tout un pan de notre agriculture et en particulier nos productions les plus fragiles comme l’élevage. Et ce d’autant plus que les négociateurs américains refusent obstinément de reconnaître nos indications géographiques, véritable expression d’une agriculture de qualité favorable au développement des territoires.

En ce qui concerne le Ceta, le Parlement européen donnera - ou non - son approbation en février 2017. En fonction de ce vote, l’accord entrera ou pas en application provisoire. Le Ceta prévoit que plus de 90 % des produits agricoles et agroalimentaires européens seront exportés au Canada sans droits de douane. Et réciproquement pour les produits canadiens en Europe.

Mais, le Ceta ne fait pas l’unanimité dans les milieux agricoles. Il est par exemple fortement redouté, à juste titre, par la filière bovine qui, on le sait, est déjà à bout de souffle. Pour cette filière, ce n’est pas uniquement cet accord qui présente une difficulté. C’est dans l’accumulation des concessions dans les négociations en cours et à venir (TTIP, Mercosur, etc.), que réside le problème. Nous devons en tenir compte.

 

 

Actualités

Boutique
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client abonnements@info6tm.com - 01.40.05.23.15