Arrêter de considérer que les acheteurs se bousculent pour le blé français

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Une étude du think tank Agriculture Stratégies publiée en 2019, "Céréales françaises, de la vocation exportatrice à la décommoditisation", par Frédéric Courteux, directeur des études et Christopher Gaudoin, chargé de veille et d’analyse stratégique, interroge sur l'avenir des exportations françaises et l’équilibre à l’échelle européenne entre surfaces de céréales et d'oléoprotéagineux.

Sachant que la SAU européenne n’est pas extensible, l’étude soulève l’idée de baisser la sole de céréales au profit de cultures oléoprotéagineuses en vue de baisser notre dépendance aux protéines. À titre de comparaison, l’étude mentionne les ratios suivants, en Europe, le rapport est de 1 ha de soja/colza/tournesol pour 5,16 ha de céréales, ce rapport est plus équilibré ailleurs dans le monde, (0,63 ha au Brésil, 1,66 ha aux États-Unis et de 3,33 ha en Russie). Ce rééquilibrage serait de nature à limiter la vocation exportatrice de l’Europe et surtout de la France, notamment en blé. Mais le credo de l’étude est plutôt d’exporter moins mais mieux, d’avoir une stratégie de différenciation et de décommoditisation.

Selon les termes de l’étude, la notion de commodité signifie uniformisation, homogénéisation, qualité moyenne, "ce besoin de standardisation de la production s’est développé pour les besoins des marchés à terme", peut-on lire. À l’inverse, la décommoditisation implique une stratégie de différenciation, qui met en avant l’originalité de certaines qualités intrinsèques, des conditions de production, voire du producteur lui-même. Les auteurs soulignent que la filière viticole a mis en place cette stratégie, alors qu’il y a 50 ans, on transportait le vin dans des trains citernes.

La difficulté pour l’UE aujourd’hui, c’est qu’elle joue la concurrence avec les pays les plus compétitifs alors qu’elle ne bénéficie pas des filets de sécurité actifs (comme aux États-Unis) pour protéger ses producteurs. Le marché européen est un marché mature sur le plan quantitatif, rappellent les auteurs, non sans rappeler que la "tristement célèbre campagne 2016" a pu émousser certains importateurs.

L’étude indique toutefois qu’il ne s’agit pas de renoncer à notre vocation exportatrice, mais qu’il faut sans aucun doute changer d’approche et arrêter de considérer que les acheteurs se bousculent pour le blé français : "Plutôt que de rester entre deux, le marché et la diplomatie, il faudrait réhabiliter des accords inter-étatiques qui fixent le volume et la valeur. Ce qui signifierait pour la filière française de mettre en œuvre une stratégie autour du stockage qui permettrait d’assurer ces engagements même en cas de mauvaise récolte."

Ainsi ils concluent que la différenciation doit devenir "une option très sérieuse". D’ores et déjà des filières tripartites comme "Lu Harmony" existent et il faut les encourager et les développer, rappelant au passage que la France importe des blés de qualité supérieure dit "blés de force" pour approvisionner la boulangerie… Alors que nous avons sans doute la capacité, le territoire, le savoir-faire technique pour produire des qualités bien spécifiques pour satisfaire les marchés. Quand bien même la France produirait moins en volume, ce rééquilibrage entre surfaces céréalières et oléaoprotéagineux pourrait permettre que les prix domestiques soient supérieurs aux prix internationaux…

Pour aller plus loin et lire l’ensemble de l’étude.

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