Expérimentation en bio : l’ensilage de luzerne pour fertiliser les blés

Comparaison d'un épandage d'ensilé de luzerne et d'un apport de fientes

Comparaison au 24 février d'un épandage sur blé en sols profonds de 14 t/ha d'ensilé de luzerne et d'un apport de 2t/ha de fientes.

Crédit photo Kevin Jestin/Bio Bourgogne Franche-Comté
Le réseaux Bio Bourgogne-Franche-Comté s’est penché sur l’intérêt de l’utilisation de la luzerne ensilée pour fertiliser les blés d’exploitations bio spécialisées en grandes cultures. L’ensilage épandu comporte en moyenne 9 kg d’azote par tonne, avec un rapport C/N de 20.

Très présente dans les rotations en agriculture biologique, la luzerne ne trouve pas toujours son débouché au sein même des exploitations spécialisées en grandes cultures. Le réseau Bio Bourgogne-Franche-Comté s’est penché sur les pistes de valorisation de la luzerne ensilée comme engrais. L’expérimentation grandeur nature s’est déroulée sur l’exploitation de Vincent Cintract, située dans le sud de l’Yonne.

« L’idée était de valoriser les terres superficielles à plus faible potentiel pour produire de la luzerne à vocation d’engrais et de s’en servir pour fertiliser les blés en terres plus profondes en remplaçant les fientes de volailles », explique Kevin Jestin, conseiller grandes cultures pour Bio Bourgogne-Franche-Comté et animateur du GIEE Innov Bio 58. Le prix des fientes de volailles jusque-là utilisées sur cette exploitation s’est en effet envolé entre 2021 et 2022, passant de 70 euros la tonne à 120, voire 130 euros par tonne.

Concrètement, sur les 86 ha d’argilo-calcaires superficiels, une seule coupe de luzerne a été réalisée autour du 30 mai 2023, produisant en moyenne 3,5 tonnes de MS par hectare. « Pour la date de fauche, l’objectif était aussi de récolter avant que les vulpins présents dans certaines parcelles ne montent à graines », précise Kévin Jestin.

La luzerne a ensuite été partiellement fanée, puis ensilée.

« L’intérêt de l’ensilage est de constituer une forme de conservation pour pouvoir reporter l’épandage effectué en octobre 2023. La question s’était posée de l’intérêt du compost, mais lors du compostage de la luzerne, riche en azote, les températures peuvent vite monter et aboutir à des pertes d’azote. L’ensilage a donc été préféré comme mode de conservation de la luzerne », relate-t-il.

9 kg d’azote par tonne d’ensilé

Les opérations de fauchage, fanage et ensilage ont été réalisées par un prestataire de services. Une analyse de l’ensilage a été faite avant et après stockage, validant peu de pertes d’azote par le processus d’ensilage.

« L’ensilage épandu comporte en moyenne 9 kg d’azote par tonne, avec un rapport C/N de 20. Il s’agit d’une moyenne, avec quelques variantes. Sur les 86 ha concernés, certaines parcelles présentaient des graminées (vulpin, ray-grass ou repousses), diminuant ainsi la proportion d’azote. Trois grands types d’ensilages ont été étudiés  avant d’être mis en silo unique , dont le plus riche en azote avoisinait les 12 kg d’N/t, cela donne une idée du potentiel », indique Kévin Jestin.

L’épandage de la luzerne ensilée a été effectué à l’automne 2023 au moment du semis du blé avec l’épandeur à table densimétrique de l’exploitant, d’habitude utilisé pour les fientes. Deux modalités ont été mises en place : avec un apport de 7 t/ha et avec un apport de 14 t/ha.

Le suivi de la parcelle a intégré la surveillance des levées d’adventices. « Comme la luzerne contenait plus ou moins de vulpins selon les parcelles, nous souhaitions nous assurer que l’épandage de l’ensilage n’engendrait pas de levée de graminées supplémentaires. Nous n’avons constaté aucune levée de vulpins liée à cette nouvelle pratique », signale-t-il

Coût de l’azote épandu

Une mesure des reliquats sera effectuée en sortie d’hiver pour voir comment la luzerne minéralise par rapport aux fientes et déterminer précisément à quel moment se produit la libération de l’azote par rapport aux besoins du blé. Cela permettra de définir s’il est nécessaire de décaler la date d’apport, au moment du semis ou plus tard.

Le coût total des opérations de fauche-ensilage-épandage (y compris protection contre les sangliers) a été évalué à 25 euros/tMB, soit 2,84 euros/kg d’azote épandu.

Des chiffres qui pourraient être améliorés selon les simulations effectuées :

« Avec une luzerne récoltée ne comportant que peu de graminées (optimisation de la teneur en azote) et fanée à 49,7 % de matière sèche (au lieu de 38 %), le coût de l’azote épandu serait alors de 2,31 euros/kg », estime le conseiller grandes cultures.

Alors, rentable l’ensilage de luzerne par rapport aux fientes de poules ? A priori oui, dans les situations où la luzerne ne peut pas être vendue. Reste à étudier l’impact de l’apport d’ensilage de luzerne sur le rendement du blé : le suivi se poursuit en partenariat avec les chambres d’agriculture de la Nièvre et de l’Yonne.

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