Comment pourrait se dessiner Écophyto après la pause ?

Tractor spraying young corn with pesticides

Si le plan Écophyto a déjà porté quelques fruits, un nouvel indicateur de mesure des progrès et une approche fondée sur la coconstruction avec les acteurs s'imposent. 

Crédit photo Marritch/Adobe Stock
Suspendu jusqu’au Salon de l’agriculture, le plan visant à réduire de 50 % l’usage de produits phytosanitaires en France à horizon 2030 n’est pas abandonné. Reste à savoir quelle en sera la nouvelle mouture. Tentative de réponse avec Phyteis qui souhaite avant tout un changement de méthode et de philosophie.

Au plus fort de la crise agricole, l'annonce d’une « mise en pause » du plan Écophyto le 1er février, puis d’un rendez-vous pris par le Gouvernement en amont du Salon de l’agriculture, qui commence le 24 février, laisse les acteurs agricoles - des producteurs aux fournisseurs de produits phytosanitaires - sur leur faim.

Pour l'heure, il a seulement été évoqué de privilégier l'indicateur européen, le HRI-1, plutôt que le seul Nodu français pour mesurer les progrès réalisés en matière de réduction des pesticides, a indiqué le ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, Marc Fesneau.

Pas d’interdictions sans alternatives

En outre, le ministre avait également confirmé que la France n’interdirait plus de substances phytosanitaires supplémentaires pour protéger les cultures tant que des alternatives plus respectueuses de l’environnement et de la santé publique n’étaient pas en place.

Un engagement qu’attendaient avec impatience les exploitants puisqu’ils voyaient dans cette volonté française de faire mieux que le reste de l’Europe une distorsion de la concurrence.

De nombreuses impasses techniques

Mais il n’empêche, « en France, 38 % des usages ne sont pas pourvus en solutions de protection et 25 % ne disposent que d’une unique solution, un constat plaçant un nombre grandissant de filières, comme le blé, le colza, la vigne, la cerise, la pomme, l’endive ou la noisette, en situation d’impasse technique », indique Phyteis.

Que faire alors ? L’organisation professionnelle, qui fédère les 18 entreprises accompagnant les agriculteurs français dans la protection de leurs cultures grâce à l’agronomie digitale, les biotechnologies, la bioprotection et la phytopharmacie conventionnelle, a quelques idées.

Mais encore faut-il qu’elle puisse être entendue… Or Yves Picquet, son président, a regretté, lors d’une conférence de presse qui s’est tenue le 8 février 2024, le manque de dialogue avec les autorités. « Si l’organisation professionnelle est bien conviée, parfois, à certaines réunions, elle doit la plupart du temps se contenter d’écouter », a-t-il déclaré.

Incitation plutôt qu’obligation punitive

Mais au-delà d’un changement de méthode pour une plus grande démocratie dans la mise en œuvre d’un plan post-grogne des agriculteurs, Phytéis appelle aussi de ses vœux l’adoption d’une nouvelle philosophie «centrée sur la coconstruction et l’incitation plutôt que sur l’obligation punitive », synthétise Yves Picquet.

Démarche combinatoire

Plus concrètement, l’organisation préconise avant tout le déploiement d’une démarche combinatoire qui réunit quatre familles de solutions complémentaires et indissociables pour lutter contre les bioagresseurs :

  • l’agronomie digitale, qui facilite le pilotage des itinéraires techniques ;
  • la bioprotection, directement inspirée des mécanismes naturels ;
  • les biotechnologies, qui constituent l’une des formes les plus prometteuses de protection intrinsèque des cultures ;
  • et la phytopharmacie, utilisée de façon ciblée lorsqu’aucune alternative efficace n’est disponible.

« Penser que l’on pourra se passer entièrement de produits chimiques dans les années qui viennent est une utopie », a d’ailleurs tranché Yves Picquet.

Au contraire, a-t-il ajouté, « associées, ces solutions constituent une véritable boîte à outils adaptée à toutes les exploitations agricoles et toutes les configurations de terrain. Elles doivent apporter aux agriculteurs des réponses sur-mesure, efficaces et abordables face aux enjeux de souveraineté agricole et de sécurité alimentaire, de préservation des écosystèmes et d’adaptation de l’agriculture au changement climatique, sans oublier la performance économique des exploitations agricoles ».

Et ce, d’autant que la FAO estime que les ravageurs et les maladies des plantes causent chaque année jusqu’à 40 % de pertes de cultures vivrières.

Baisse structurelle de l’usage des produits

Pour l’heure, le plan Écophyto a déjà porté quelques fruits. En effet, selon Phytéis, les chiffres (arrêtés à 2022) montrent une baisse structurelle observée depuis plus de 20 ans. « Le volume des ventes à la distribution a ainsi reculé de 17,4 % depuis 2008, année de lancement du plan Écophyto, et de 46 % depuis 1999 », détaille l’organisation.

Et si certains éléments augmentent néanmoins, « ils s’expliquent en grande partie par la croissance des ventes de matières actives utilisables en agriculture biologique (UAB). Les UAB comptent ainsi pour près de la moitié de la hausse des volumes vendus entre 2021 et 2022. Avec 24.000 tonnes vendues en 2022, en croissance de près de 24 % en un an et de 54 % par rapport à 2020, les UAB représentent plus du tiers des volumes de matières actives vendues à la distribution (37 %) », fait valoir Phyteis.

Séparer le conseil et la vente : « une fausse bonne idée »

De fait, d’une part, toutes les substances sont prises en compte dans les calculs et de l’autre, de plus en plus d’agriculteurs travaillant en conventionnel choisissent d’utiliser des produits destinés à l’agriculture biologique afin de mieux respecter l’environnement et la santé publique.

À cet égard, la séparation de la vente et du conseil à l'utilisation des produits phytopharmaceutiques depuis le 1er janvier 2021 apparaît comme « une fausse bonne idée », avance Yves Picquet.

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